À l’occasion de la sor­tie de son nou­veau livre, le Préfet de la con­gré­ga­tion pour le culte divin, l’une des voix les plus fortes de l’Église, nous a reçu à Rome pour un entre­tien exclusif.

Ama­teurs de langue de buis, s’abstenir ! Si les livres de prélats catholiques sus­ci­tent sou­vent un ennui poli par leur tiédeur de tisane, le Soir approche et déjà le jour baisse, le nou­veau livre d’entretiens du car­di­nal Robert Sarah avec Nico­las Diat, fait fig­ure d’alcool fort. Rap­pelant qu’un monde qui oublie Dieu va à sa perte, ren­voy­ant dos à dos la « bar­barie matéri­al­iste » et la « bar­barie islamiste », exhor­tant l’Eglise à remet­tre le Christ au cen­tre, dénonçant le pacte de Mar­rakech soutenu par le Vat­i­can ou met­tant en garde con­tre l’ordination d’hommes mar­iés que cer­tains voudraient expéri­menter à l’occasion du prochain syn­ode sur l’Amazonie, le car­di­nal Sarah invite à une véri­ta­ble résis­tance spir­ituelle, rap­pelant que seul le Christ est l’Espérance du monde.

Pourquoi avoir choisi un titre aus­si som­bre, au risque d’effrayer le lecteur ?
Ce livre est d’abord un appel à la lucid­ité et à la clair­voy­ance. L’Église tra­verse une grande crise. Les vents sont d’une vio­lence rare. Rare sont les journées sans scan­dale, réels ou men­songers. Les fidèles peu­vent donc légitime­ment s’interroger. J’ai voulu ce livre pour eux. Je souhaite qu’ils puis­sent sor­tir de cette lec­ture avec la joie que donne le Christ : « Reste avec nous, Seigneur : le soir approche et déjà le jour baisse. » C’est la résur­rec­tion du Fils de Dieu qui donne l’Espérance dans l’obscurité.

Le choix de ce ver­set extrait de l’Évangile des pèlerins d’Emmaüs, est-ce pour vous une manière d’indiquer que l’Eglise ne met pas suff­isam­ment le Christ et la prière au cen­tre ?
Je crois fer­me­ment que la sit­u­a­tion que nous vivons au sein de l’Eglise ressem­ble en tout point à celle du Ven­dre­di saint, quand les apôtres ont aban­don­né le Christ, que Judas l’a trahi, car le traître voulait un Christ à sa manière, un Christ préoc­cupés par des ques­tions poli­tiques. Aujourd’hui, nom­bre de prêtres et d’évêques sont lit­térale­ment ensor­celés par des ques­tions poli­tiques ou sociales. En réal­ité, ces ques­tions ne trou­veront jamais de répons­es en dehors de l’enseignement du Christ. Il nous rend plus sol­idaires, plus frater­nels ; tant que nous n’avons pas le Christ comme grand-frère, le pre­mier-né d’une mul­ti­tude de frères, il n’y a pas de char­ité solide, pas d’altérité véri­ta­ble. Le Christ est la seule lumière du monde. Com­ment l’Eglise pour­rait-elle se détourn­er de cette lumière ? Com­ment peut-elle pass­er son temps à se per­dre dans des ques­tions pure­ment matérialistes ?

Certes, il est impor­tant d’être sen­si­bles aux per­son­nes dans la souf­france. Je pense en par­ti­c­uli­er aux hommes qui quit­tent leur pays. Mais pourquoi s’éloignent-ils de leur terre ? Parce que des puis­sances sans foi, qui ont per­du Dieu, pour qui il n’y a que l’argent et le pou­voir qui comptent, ont désta­bil­isé leurs nations. Ces dif­fi­cultés sont immenses. Mais, je le répète, l’Église doit d’abord redonner aux hommes la capac­ité de regarder vers le Christ : « Quand je serai élevé, j’attirerai tous les hommes ». C’est le Christ cru­ci­fié qui nous apprend à prier et à dire : « Par­donne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». C’est en regar­dant le Fils de Dieu que l’Eglise pour­ra appren­dre à porter les hommes vers la prière et à par­don­ner comme le Christ. Ce livre veut essay­er de redonner à l’Église le sens de sa grande mis­sion divine. Pour qu’elle puisse porter les hommes au Christ qui est l’Espérance. Voilà la sig­ni­fi­ca­tion du titre de notre livre : aujourd’hui tout est som­bre, dif­fi­cile, mais quelles que soient les dif­fi­cultés que nous tra­ver­sons, il y a une seule per­son­ne qui peut venir à notre sec­ours. Il faut qu’il y ait une insti­tu­tion pour con­duire à cette per­son­ne : c’est l’Eglise.

Rap­pel­er l’Eglise à sa vraie mis­sion : c’est une manière de dire qu’elle s’en écarte par­fois. Vous allez jusqu’à dénon­cer les pas­teurs qui trahissent leurs bre­bis, ce que beau­coup de catholiques ont du mal à croire…
Votre remar­que n’est pas pro­pre à notre temps : regardez l’ancien Tes­ta­ment, qui abonde en mau­vais pas­teurs, ces hommes qui aiment bien prof­iter de la viande ou de la laine de leur bre­bis, sans pren­dre soin d’elles ! Il y a tou­jours eu des trahisons dans l’Eglise. Aujourd’hui, je ne crains pas d’affirmer que des prêtres, des évêques et même des car­dinaux ont peur de proclamer ce que Dieu enseigne et de trans­met­tre la doc­trine de l’Eglise. Ils ont peur d’être dés­ap­prou­vés, d’être vus comme des réac­tion­naires. Alors ils dis­ent des choses floues, vagues, impré­cis­es, pour échap­per à toute cri­tique, et ils épousent l’évolution stu­pide du monde. C’est une trahi­son : si le pas­teur ne con­duit pas son trou­peau vers les eaux tran­quilles, vers les prés d’herbe fraîche dont par­le le psaume, s’il ne le pro­tège pas con­tre les loups, c’est un pas­teur crim­inel qui aban­donne ses bre­bis. S’il n’enseigne pas la foi, s’il se com­plait dans l’activisme au lieu de rap­pel­er aux hommes qu’ils sont faits pour prier, il trahit sa mis­sion. Jésus dit : « Je frap­perai le berg­er, et les bre­bis seront dis­per­sées. » C’est ce qui se passe aujourd’hui. On ne sait plus vers qui se tourner.

À l’évidence, il existe une forte majorité de prêtres qui restent fidèle à leur mis­sion d’enseignement, de sanc­ti­fi­ca­tion et de gou­verne­ment. Mais il y a aus­si un petit nom­bre qui cède à la ten­ta­tion mor­bide et scélérate d’aligner l’Eglise sur les valeurs des sociétés occi­den­tales actuelles.

N’y a‑t-il pas aujourd’hui, plus spé­ci­fique­ment, la ten­ta­tion chez cer­tains d’aligner l’Eglise sur les valeurs du monde, afin de ne plus être en con­tra­dic­tion avec lui ?
À l’évidence, il existe une forte majorité de prêtres qui restent fidèle à leur mis­sion d’enseignement, de sanc­ti­fi­ca­tion et de gou­verne­ment. Mais il y a aus­si un petit nom­bre qui cède à la ten­ta­tion mor­bide et scélérate d’aligner l’Eglise sur les valeurs des sociétés occi­den­tales actuelles. Ils veu­lent avant tout que l’on dise que l’Église est ouverte, accueil­lante, atten­tive, mod­erne. Mais l’Eglise n’est pas faite pour écouter, elle est faite pour enseign­er : elle est Mater et mag­is­tra, mère et édu­ca­trice. Certes, la maman écoute son enfant, mais elle est d’abord présente pour enseign­er, ori­en­ter et diriger, car elle sait mieux que ses enfants la direc­tion à pren­dre. Cer­tains ont adop­té les idéolo­gies du monde actuel sous le pré­texte fal­lac­i­eux de s’ouvrir au monde ; mais il faudrait plutôt porter le monde à s’ouvrir à Dieu qui est la source de notre existence.

Vous par­lez dans votre livre d’une crise de la théolo­gie morale : est-ce que ce n’est pas avant tout la ten­ta­tion de sac­ri­fi­er la doc­trine à la pas­torale, c’est-à-dire le con­tenu au con­tenant, et une fausse con­cep­tion de la mis­éri­corde, telle­ment soucieuse d’afficher sa com­préhen­sion qu’elle en oublie de rap­pel­er les règles de la vie bonne ?
Toute pas­torale est comme une mai­son : s’il n’y a pas de fon­da­tions, la mai­son s’écroule. La pas­torale doit être con­stru­ite sur l’enseignement de l’Eglise. On oublie trop sou­vent la doc­trine pour se focalis­er seule­ment sur la pas­torale ; mais c’est alors une pas­torale vide, puérile et bête. On ne peut pas sac­ri­fi­er la doc­trine à une pas­torale qui serait réduite à la por­tion con­grue de la mis­éri­corde : Dieu est mis­éri­cordieux, mais dans la seule mesure où nous recon­nais­sons que nous sommes pécheurs. Pour per­me­t­tre à Dieu d’exercer sa mis­éri­corde, il faut revenir à Lui, comme l’enfant prodigue. Il y a une ten­dance per­verse qui con­siste à fauss­er la pas­torale, à l’opposer à la doc­trine, et à présen­ter un Dieu mis­éri­cordieux qui n’exige rien : mais il n’y a pas un père qui n’exige rien de ses enfants ! Dieu, comme tout bon père, est exigeant, parce qu’il nour­rit des ambi­tions immenses pour nous. Le Père veut que nous soyons à son image et à sa ressemblance.

Vous par­lez d’affadissement de la foi des fidèles, ce que Benoît XVI appelait un « chris­tian­isme bour­geois » ou ce que le pape François appelle la « pagan­i­sa­tion de la vie chré­ti­enne ». Ces chré­tiens qui ne veu­lent plus être le sel de la Terre mais préfèrent en être le sucre, n’est-ce pas un défi encore plus grand que les hérésies d’autrefois ?
Cette espèce de mol­lesse ou d’affadissement fait par­tie de la cul­ture actuelle : il faut être tolérant, respecter les gens, évoluer avec eux. Certes, nous avons le devoir d’être com­préhen­sif, de marcher au pas des gens, mais il faut en même temps les aider à ren­forcer leurs mus­cles. Il faut des mus­cles pour faire de l’alpinisme. Les mêmes qual­ités sont req­ui­s­es pour mon­ter sur la mon­tagne Dieu : il faut les mus­cles de la foi, de la volon­té, de l’espérance, et de l’amour. Il est impor­tant qu’on ne trompe pas les fidèles avec une reli­gion molle, sans exi­gence, sans morale. L’Evangile est exigeant : « Si ton œil est pour toi une occa­sion de chute, arrache-le ! Si ta main droite est une occa­sion de chute, coupe-la ! » Notre rôle est juste­ment de porter le peu­ple à cette exi­gence évangélique.

Vous écrivez que « l’Occident fait l’expérience de la soli­tude rad­i­cale et délibéré­ment voulue des damnés » : com­ment par­ler de Dieu à des gens qui comme vous l’écrivez, « n’éprouvent pas le besoin d’être sauvés » ?
Regardez le Christ : vous croyez que les gens qu’il avait devant lui voulaient l’écouter ? L’opposition à Dieu, à la Vérité, existe depuis tou­jours. En Occi­dent, il est dif­fi­cile de par­ler de Dieu, parce que la société émol­liente du bien-être croit ne pas avoir besoin de Lui. Mais ce con­fort matériel ne suf­fit pas. Il existe un bon­heur caché que les gens cherchent con­fusé­ment sans le savoir. L’Eglise doit faire décou­vrir à l’homme ces besoins intérieurs, ces richess­es de l’âme qui le ren­dent pleine­ment homme, qui le ren­dent pleine­ment heureux. Saint Irénée dit que « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devi­enne Dieu » ; c’est la mis­sion de l’Eglise de guider l’homme dans cette mon­tée vers Dieu. Mais si les prêtres sont englués dans le matéri­al­isme, ils ne pour­ront pas guider le monde vers le bon­heur véritable.

La vraie réforme porte sur notre pro­pre con­ver­sion. Si nous ne changeons pas nous-mêmes, toutes les réformes de struc­ture seront inutiles. Laïcs, prêtres, car­dinaux, nous devons tous revenir vers Dieu.

Cette désaf­fec­tion vis-à-vis de l’Eglise, les respon­s­ables catholiques ont sou­vent ten­dance à la met­tre sur le dos du matéri­al­isme ambiant, des évo­lu­tions de la société. Ne serait-il pas utile que l’Eglise s’interroge aus­si sur ses respon­s­abil­ités, sur la façon dont elle a pu éloign­er les fidèles en désacral­isant la liturgie, en tour­nant le dos à la pitié pop­u­laire ou en affadis­sant sa prédi­ca­tion ?
Je suis con­va­in­cu que la respon­s­abil­ité pre­mière de cet écroule­ment de la foi doit être assumée par les prêtres. Dans les sémi­naires ou dans les uni­ver­sités catholiques, nous n’avons pas tou­jours enseigné la doc­trine. Nous avons enseigné ce qui nous plai­sait ! Le catéchisme aux enfants a été aban­don­né. La con­fes­sion a été méprisée. D’ailleurs, il n’y avait plus de prêtres dans les con­fes­sion­naux ! Nous sommes donc par­tielle­ment respon­s­ables de cet effon­drement. Dans les années soix­ante-dix et qua­tre-vingt en par­ti­c­uli­er, chaque prêtre fai­sait ce qu’il voulait à la messe. Il n’y avait pas deux mess­es qui se ressem­blaient : voilà ce qui a découragé tant de fidèles d’y venir. Le pape Benoît XVI dit que la crise de la liturgie a provo­qué la crise de l’Eglise. Lex oran­di, lex cre­den­di : comme on prie, on croit. S’il n’y a plus de foi, la liturgie est réduite à un show, à un folk­lore, et les fidèles se détour­nent. Nous avons prob­a­ble­ment été coupables de nég­li­gence. La désacral­i­sa­tion de la liturgie a tou­jours des con­séquences graves. Nous avons voulu human­is­er la messe, la ren­dre com­préhen­si­ble, mais elle reste un mys­tère qui est au-delà de la com­préhen­sion. Quand je dis la messe, quand je donne l’absolution, je sai­sis les mots que je dis, mais le mys­tère que ces mots réalisent, l’intelligence ne peut pas le com­pren­dre. Si nous ne ren­dons pas jus­tice à ce grand mys­tère, nous ne pou­vons pas amen­er le peu­ple à une vraie rela­tion à Dieu. Aujourd’hui encore, nous avons une pas­torale trop hor­i­zon­tale : com­ment voulez-vous que les gens pensent à Dieu, si ce sont unique­ment les ques­tions sociales qui occu­pent l’Eglise ?

On attend de façon immi­nente une réforme de la curie romaine. Dans votre livre, vous êtes assez scep­tique sur ces réformes de struc­ture…
La vraie réforme porte sur notre pro­pre con­ver­sion. Si nous ne changeons pas nous-mêmes, toutes les réformes de struc­ture seront inutiles. Laïcs, prêtres, car­dinaux, nous devons tous revenir vers Dieu. L’histoire a con­nu deux réfor­ma­teurs : Luther, qui a voulu chang­er la face de l’Eglise et qui a fini par en sor­tir, et François d’Assise qui a trans­for­mé l’Eglise en vivant rad­i­cale­ment l’Evangile. Aujourd’hui, la vraie réforme, c’est une vie rad­i­cale­ment évangélique. Mère Tere­sa, d’une manière dis­crète et hum­ble, a réfor­mé l’Eglise, en ne se las­sant pas de proclamer à la face du monde : ”Occupe-toi des pau­vres, mais avant cela, occupe-toi d’abord de Dieu”. Elle savait par expéri­ence que nous sommes trop pau­vres pour nous occu­per des pau­vres. Tant que nous ne sommes pas enrichis par la présence de Dieu en nous, on ne peut pas s’occuper des plus faibles.

On par­le aus­si beau­coup de syn­odal­ité, de col­lé­gial­ité. Vous pointez dans votre livre le risque que des con­férences épis­co­pales se con­tre­dis­ent entre elles. Craignez-vous qu’une réforme du cen­tral­isme de l’Eglise romaine mette en dan­ger son unité ?
Le Christ a fondé une Église dont le mode de gou­verne­ment est hiérar­chique. Le pre­mier respon­s­able de l’Eglise, c’est le pape. Le pre­mier respon­s­able de l’Eglise locale, c’est l’évêque en son diocèse, et non la Con­férence épis­co­pale, qui est utile pour échang­er, pas pour impos­er une direc­tion. Je pense qu’il faut retrou­ver cette respon­s­abil­ité pre­mière du pape et de chaque évêque. Les grands évêques de l’histoire, Ambroise ou Augustin, ne pas­saient pas leur temps à faire des réu­nions à droite, des com­mis­sions à gauche, des voy­ages con­tin­uels. Il faut que l’évêque soit avec son peu­ple, enseigne son peu­ple, aime son peuple.

Une Con­férence épis­co­pale n’a pas d’autorité juridique, ni de com­pé­tence pro­pre dans le domaine de la doc­trine. D’ailleurs, je con­state tris­te­ment qu’il y a déjà des con­tra­dic­tions entre les con­férences épis­co­pales, ce qui ne favorise pas la sérénité des chré­tiens. « Qu’ils soient uns », a dit le Seigneur, pour que cette unité provoque la foi. Si nous con­tin­uons dans cette direc­tion qui con­siste à met­tre à mal l’unité doc­tri­nale et morale, nous con­tribuerons à accroître l’incroyance.

Qu’avez-vous pen­sé du livre Sodoma ? Pensez-vous qu’on assiste actuelle­ment à une offen­sive général­isée con­tre la fig­ure du prêtre, objet de scan­dale pour une société hyper­sex­u­al­isée ?
Je n’ai pas lu ce livre. Mais je crois qu’il y a un pro­jet par­ti­c­ulière­ment struc­turé de destruc­tion de l’Eglise en décap­i­tant la tête, les car­dinaux, les évêques et les prêtres. On s’acharne à détru­ire le sac­er­doce, et notam­ment à détru­ire le céli­bat, qui serait impos­si­ble et con­tre-nature : parce que si on détru­it le céli­bat, on affecte sans retour une des plus grandes richess­es de l’Eglise. L’abandon du céli­bat aggrav­erait encore la crise de l’Eglise et amoin­dri­rait la posi­tion du prêtre, qui est appelé à être non seule­ment un autre Christ, mais le Christ lui-même, pau­vre, hum­ble et céli­bataire. Si le céli­bat dis­paraît, c’est le témoignage que Jésus a voulu don­ner qui meurt.

Il y a une volon­té d’affaiblir l’Eglise, de mod­i­fi­er son enseigne­ment sur la sex­u­al­ité. Mais quand on voit la quan­tité énorme de prêtres fidèles dans le sac­er­doce, il faut rester sere­in, et pour­suiv­re notre témoignage de don total à Dieu par le céli­bat. Ce témoignage n’est pas com­pris. Il est détesté ? Jésus-Christ lui-même n’a pas été accep­té, puisqu’il est mort sur la Croix. Jésus nous a dit : « Ils m’ont per­sé­cuté, ils vous per­sé­cuteront aussi. »

Il y a des hommes d’Eglise, cer­tains haut placés, qui ont terni l’Eglise, défig­uré le vis­age du Christ, mais Judas ne doit pas nous con­duire à rejeter tous les apôtres. Ces défail­lances graves ne con­damnent pas l’Eglise : au con­traire, cela mon­tre que Dieu fait con­fi­ance, même à des per­son­nes faibles, pour mon­tr­er la puis­sance de son amour pour nous. Il ne con­fie pas son Eglise à des héros excep­tion­nels, mais à des hommes sim­ples, pour mon­tr­er que c’est Lui qui agit à tra­vers eux.

Je suis choqué qu’on ait con­damné Mgr Bar­barin alors que l’horrible prêtre qui a com­mis ces crimes inqual­i­fi­ables n’a tou­jours pas été jugé… Je me tiens au côté du car­di­nal Bar­barin dans la prière, comme je suis au côté des victimes.

Sur la pédophilie, vous par­lez d’un « mys­tère de Judas », en pré­cisant que cette abom­inable trahi­son du sac­er­doce a été précédée par bien d’autres : quelles sont-elles ?
Un prêtre qui a per­du son lien avec Jésus, qui ne prie pas, qui ne prend pas le temps d’être avec le Christ devant le Saint-Sacre­ment, est un prêtre frag­ilisé. « Sans moi, vous ne pou­vez rien faire », dis­ait le Christ. Un prêtre mondain qui n’a plus le temps de méditer la Parole de Dieu, qui bâcle sa messe ou la célèbre de manière pro­fane, qui n’a pas de vie intérieure, ne peut pas tenir. Si on peut arriv­er à des agisse­ments aus­si graves, c’est parce qu’on s’est d’abord détaché de Jésus, de la force qui nous main­tient en lien avec lui. Pour ne pas dis­tribuer les sacre­ments comme un sim­ple fonc­tion­naire, comme s’il s’agissait d’un sim­ple phénomène humain, on a besoin d’une énergie qui vient de notre rela­tion avec l’Esprit saint. Et mal­heureuse­ment, beau­coup d’entre nous ont per­du cette rela­tion intime avec Jésus. L’activisme sac­er­do­tal con­duit à l’autisme cléri­cal, source de toutes les dérives.

Que pensez-vous de la con­damna­tion du car­di­nal Bar­barin ?
Je le con­nais depuis longtemps. J’ai beau­coup d’admiration pour lui. Il m’a accueil­li très ami­cale­ment quand je suis venu à Lyon présen­ter mon livre la Force du silence. Je ne peux pas ne pas souf­frir du mar­tyre qu’on lui impose, d’autant que je suis per­suadé qu’il est inno­cent. Toute l’Eglise porte cette souf­france col­lé­giale­ment. Le pape a eu vrai­ment rai­son de pren­dre la déci­sion de ne pas accepter sa démis­sion pour respecter la pré­somp­tion d’innocence en atten­dant le juge­ment en appel. Et le car­di­nal Bar­barin a été courageux de se met­tre en retrait, en par­tant dans un monastère, pour le bien du diocèse et pour apporter la paix aux vic­times de ces actes abom­inables. Mais je suis choqué qu’on ait con­damné Mgr Bar­barin alors que l’horrible prêtre qui a com­mis ces crimes inqual­i­fi­ables n’a tou­jours pas été jugé… Je me tiens au côté du car­di­nal Bar­barin dans la prière, comme je suis au côté des victimes.

Beau­coup de nos con­tem­po­rains voient l’Eglise comme une organ­i­sa­tion total­i­taire, qui va leur impos­er une façon de vivre. Vous affirmez au con­traire que c’est l’Eglise qui est le rem­part con­tre le total­i­tarisme con­tem­po­rain…
Ce sont les idéolo­gies nou­velles qui imposent un change­ment rad­i­cal de la morale, de l’anthropologie humaine, une nou­velle vision de la famille, de la sex­olo­gie, avec des pres­sions impor­tantes, finan­cières et médi­a­tiques. L’Eglise n’impose rien, elle ne fait que pro­pos­er. Mais c’est sa mis­sion de pro­pos­er l’enseignement de Dieu au monde.

Vous allez jusqu’à ren­voy­er dos à dos la « bar­barie islamiste » et la « bar­barie matéri­al­iste », au risque de cho­quer…
En tout cas, c’est ma con­vic­tion ! Ce sont deux démons, qui ont peut-être des méthodolo­gies dif­férentes, mais ils agis­sent dans la même direc­tion. Le matéri­al­isme nous éloigne rad­i­cale­ment de Dieu et de l’homme intérieur. L’islamisme aus­si. Dieu ne peut pas inspir­er la bar­barie. Tuer quelqu’un parce qu’il ne partage pas votre foi ? Faire éclater une bombe dans un bus et tuer des inno­cents au nom d’Allah ? C’est chose impos­si­ble à Dieu.

Mais la bar­barie matéri­al­iste n’a pas pour objec­tif affiché la destruc­tion, elle pré­tend amen­er l’homme au bon­heur de la libéra­tion…
C’est détru­ire un homme que de lui dire : « Tu es libre de choisir ton sexe. » C’est en réal­ité la lib­erté de se détru­ire. Mais Dieu seul nous rend libres ! De nos jours, que de destruc­tions humaines, sous pré­texte de lib­erté ! Au nom de cette même lib­erté, on détru­it beau­coup de jeunes par la pornogra­phie. L’homme s’autodétruit ; Dieu, lui, crée, pour que l’homme ait la vie, et la vie en plénitude.

Vous écrivez aus­si que le monde mod­erne détru­it en s’attaquant aux iden­tités. Vous, au con­traire, défend­ez cet enracin­e­ment que Simone Weil décrivait comme le pre­mier besoin de l’âme humaine. Cela fait de vous une voix un peu isolée dans une Eglise qui sem­ble par­fois dev­enue un sim­ple sup­plétif du par­ti immi­gra­tionniste…
Quand je suis allé en Pologne [en octo­bre 2017, NDLR], pays qui est sou­vent cri­tiqué, j’ai encour­agé les fidèles à affirmer leur iden­tité comme ils l’ont fait pen­dant des siè­cles. Mon mes­sage fut sim­ple : vous êtes d’abord Polon­ais, catholiques, et ensuite seule­ment européens. Vous ne devez pas sac­ri­fi­er ces deux pre­mières iden­tités sur l’autel de l’Europe tech­nocra­tique et apa­tride. La Com­mis­sion de Brux­elles ne pense qu’à la con­struc­tion d’un libre marché au ser­vice des grandes puis­sances finan­cières. L’Union européenne ne pro­tège plus les peu­ples. Elle pro­tège les ban­ques. J’ai voulu redire à la Pologne sa mis­sion sin­gulière dans le plan de Dieu. Elle est libre de dire à l’Europe que cha­cun a été créé par Dieu pour être placé en un endroit pré­cis, avec sa cul­ture, ses tra­di­tions, et son his­toire. Cette volon­té actuelle de glob­alis­er le monde en sup­p­ri­mant les nations, les spé­ci­ficités, est une pure folie. Le peu­ple juif a dû s’exiler, mais Dieu l’a ramené dans son pays. Le Christ a dû fuir Hérode en Egypte, mais il est revenu dans son pays à la mort d’Hérode. Cha­cun doit vivre dans son pays. Comme un arbre, cha­cun a son sol, son milieu où il s’épanouit par­faite­ment. Il vaut mieux aider les gens à s’épanouir dans leur cul­ture, que de les encour­ager à venir dans une Europe en pleine déca­dence. C’est une fausse exégèse que d’utiliser la Parole de Dieu pour val­oris­er la migra­tion. Dieu n’a jamais voulu ces déchirements.

Il faut que nous soyons en tout des résis­tants, que nous pre­nions la direc­tion con­traire du monde sécu­lar­isé, c’est-à-dire la route du Christ, l’unique sauveur du monde. J’encourage les jeunes à regarder vers le Christ.

Vous écrivez que les pays du pacte de Viseg­rad ou l’Italie vont dans la bonne direc­tion, alors que tant de voix dans l’Eglise les con­damnent. Ne pensez-vous pas que l’Eglise y risque son avenir : com­ment évangélis­er des peu­ples en con­damnant leur souci de rester eux-mêmes ?
Les dirigeants qui par­lent comme moi sont-ils aujourd’hui minori­taires ? Je ne le pense pas. Il existe beau­coup de pays qui vont dans cette direc­tion, et cela devrait nous amen­er à réfléchir ! Tous les migrants qui arrivent en Europe sont par­qués, sans tra­vail, sans dig­nité… C’est cela que l’Eglise veut ? L’Eglise ne peut pas coopér­er avec cette nou­velle forme d’esclavage qu’est dev­enue la migra­tion de masse. Si l’Occident con­tin­ue dans cette voie funeste, il y a un grand risque que, faute de natal­ité, elle dis­paraisse, envahie par les étrangers, comme Rome a été envahie par les bar­bares. Je par­le en africain. Mon pays est majori­taire­ment musul­man. Je crois savoir de quelle réal­ité je parle.

Cer­tains, dans l’Eglise, sem­blent s’accommoder de faire une croix sur l’Europe, de la pass­er par pertes et prof­it. Vous écrivez au con­traire que la pagan­i­sa­tion de l’Europe entraîn­erait la pagan­i­sa­tion du monde…
Dieu ne change pas d’avis. Dieu a don­né une mis­sion à l’Europe qui a accueil­li le chris­tian­isme. Puis les mis­sion­naires européens ont apporté le Christ jusqu’aux con­fins du monde. Et ce n’était pas un hasard, mais le plan de Dieu. Cette mis­sion uni­verselle qu’Il a don­née à l’Europe quand Pierre et Paul sont venus s’installer à Rome, à par­tir de laque­lle l’Eglise a évangélisé l’Europe et le monde, elle n’est pas ter­minée. Mais si nous y met­tons un terme en nous enfonçant dans le matéri­al­isme, l’oubli de Dieu et l’apostasie, alors les con­séquences seront graves. Si l’Europe dis­paraît, et avec elle les valeurs ines­timables du vieux con­ti­nent, l’islam envahi­ra le monde, et nous chang­erons totale­ment de cul­ture, d’anthropologie, et de vision morale.

Vous citez très abon­dam­ment Benoît XVI, quand tant de gens con­sid­èrent ce pon­tif­i­cat avorté comme un échec. Quelle est selon vous sa fécon­dité ?
Dieu a vu que le monde s’enfonçait dans une con­fu­sion funeste. Il sait que plus per­son­ne ne sait où nous allons. Il voit bien que nous per­dons tou­jours plus nos iden­tités, nos croy­ances, notre vision de l’homme et du monde… Pour nous pré­par­er à cette sit­u­a­tion, Dieu nous a don­né des papes solides : il nous a don­né Paul VI, qui a défendu la vie et le véri­ta­ble amour, mal­gré des oppo­si­tions très fortes, avec l’encyclique Humanae vitae ; il nous a don­né Jean-Paul II, qui a tra­vail­lé au mariage de la foi et de la rai­son pour qu’elles soient la lumière qui guide le monde vers une véri­ta­ble vision de l’homme — la vie même du grand Pape polon­ais a été un Evangile vivant. Il nous a don­né Benoît XVI, qui a com­posé un enseigne­ment d’une clarté, d’une pro­fondeur et d’une pré­ci­sion sans égales. Aujourd’hui, il nous donne François qui veut lit­térale­ment sauver l’humanisme chré­tien. Dieu n’abandonnera jamais son Eglise.

C’est pourquoi nous devons rester sere­ins : l’Église n’est pas en crise, c’est nous qui sommes en crise. Son enseigne­ment reste le même, sa clarté reste la même. C’est vrai que Benoît XVI n’a pas été com­pris ni accep­té, son passé à la Con­gré­ga­tion pour la doc­trine de la foi l’avait fait regarder comme un tra­di­tion­al­iste, un réac­tion­naire, mais il est demeuré calme, sere­in et hum­ble. Il a été un socle pour la doc­trine, pour la vie intérieure, pour l’avenir de l’Eglise.

À l’adresse de la jeunesse catholique, vous citez cette très belle phrase du poète anglais T.S. Eliot : « Dans le monde des fugi­tifs, celui qui prend la direc­tion opposée aura l’air d’un déser­teur. » Les jeunes croy­ants sont-ils voués à être des résis­tants ?
Il faut que nous soyons en tout des résis­tants, que nous pre­nions la direc­tion con­traire du monde sécu­lar­isé, c’est-à-dire la route du Christ, l’unique sauveur du monde. J’encourage les jeunes à regarder vers le Christ. Dans le roman d’Hemingway le Vieil homme et la mer, on voit le héros ten­ter de remor­quer vers le port un gros pois­son qu’il a pêché. Mais il ne peut pas le hiss­er seul hors de l’eau ; le temps qu’il arrive au port, les requins ont dévoré le pois­son. Les jeunes sont frag­ilisés aujourd’hui par telle­ment de sol­lic­i­ta­tions, que s’ils s’isolent, ils courent le risque énorme d’être dévorés. Aujourd’hui, si vous êtes seuls, il y a beau­coup de requins qui vont dévor­er votre foi, vos valeurs chré­ti­ennes, votre espérance. Jésus a créé une com­mu­nauté de douze apôtres et quand il a fal­lu les envoy­er en mis­sion, il les a envoyés deux par deux. Désor­mais, pour défendre notre croy­ance, pour être solide, il faut nous soutenir mutuelle­ment dans la foi, marcher comme une com­mu­nauté unie autour du Christ : « Là où deux ou trois sont réu­nis, je suis au milieu d’eux. » C’est de cette présence que nous pou­vons tir­er notre force. Le soir approche et déjà le jour baisse est une réponse pen­sée et argu­men­tée à cette urgence.

Pro­pos recueil­lis à Rome par Lau­rent Dandrieu


Le soir approche et déjà le jour baisse, du car­di­nal Robert Sarah avec Nico­las Diat, Fayard, 450 pages, 22,90 €.

Cardinal Sarah: “The Church is plunged into the darkness of Good Friday”

 

On the occa­sion of the pub­li­ca­tion of his new book, the Pre­fect of the Con­gre­ga­tion for Divine Wor­ship, one of the strongest voic­es in the Church, received us in Rome for an exclu­sive inter­view.
Lovers of box­wood lan­guage, abstain! If the books of Catholic prelates often cause bore­dom pol­ished by their luke­warm herbal tea, the Evening is approach­ing and already the day is falling, the new book of inter­views of Car­di­nal Robert Sarah with Nico­las Diat, looks like strong alco­hol. Recall­ing that a world that for­gets God is going to its down­fall, turn­ing “mate­ri­al­ist bar­barism” and “Islamist bar­barism” against each oth­er, urg­ing the Church to put Christ back at the cen­tre, denounc­ing the Mar­rakech Pact sup­port­ed by the Vat­i­can or warn­ing against the ordi­na­tion of mar­ried men that some would like to expe­ri­ence at the next Syn­od on the Ama­zon, Car­di­nal Sarah invites us to a true spir­i­tu­al resis­tance, remind­ing us that only Christ is the Hope of the world.

Why did you choose such a dark title, at the risk of scar­ing the read­er?
This book is first and fore­most a call to lucid­i­ty and clair­voy­ance. The Church is in a great cri­sis. The winds are of a rare vio­lence. Rare are days with­out scan­dal, real or false. The faith­ful can there­fore legit­i­mate­ly ques­tion them­selves. I want­ed this book for them. I hope that they will be able to come out of this read­ing with the joy that Christ gives: “Stay with us, Lord: the evening is approach­ing and the day is already falling. “It is the res­ur­rec­tion of the Son of God that gives Hope in the darkness.

Is the choice of this verse from the Gospel of the Emmaus pil­grims a way for you to indi­cate that the Church does not put Christ and prayer suf­fi­cient­ly at the cen­tre?
I firm­ly believe that the sit­u­a­tion we live in the Church is very sim­i­lar to that of Good Fri­day, when the apos­tles aban­doned Christ, when Judas betrayed him, because the trai­tor want­ed a Christ in his own way, a Christ con­cerned about polit­i­cal issues. Today, many priests and bish­ops are lit­er­al­ly bewitched by polit­i­cal or social issues. In real­i­ty, these ques­tions will nev­er be answered out­side of Christ’s teach­ing. It makes us more unit­ed, more fra­ter­nal; as long as we do not have Christ as our great broth­er, the first-born of a mul­ti­tude of broth­ers, there is no sol­id char­i­ty, no true oth­er­ness. Christ is the only light in the world. How could the Church turn away from this light? How can she spend her time get­ting lost in pure­ly mate­ri­al­is­tic matters?

Cer­tain­ly, it is impor­tant to be sen­si­tive to peo­ple in suf­fer­ing. I am think­ing in par­tic­u­lar of men who leave their coun­try. But why are they mov­ing away from their land? Because faith­less pow­ers, who have lost God, for whom only mon­ey and pow­er mat­ter, have desta­bi­lized their nations. These dif­fi­cul­ties are immense. But, I repeat, the Church must first of all restore to men the abil­i­ty to look to Christ: “When I am lift­ed up, I will attract all men”. It is the cru­ci­fied Christ who teach­es us to pray and to say: “For­give them, they do not know what they are doing”. It is by look­ing at the Son of God that the Church will be able to learn to lead peo­ple to prayer and to for­give like Christ. This book is intend­ed to try to restore to the Church the mean­ing of her great divine mis­sion. So that she can bring men to Christ who is Hope. This is the mean­ing of the title of our book: today every­thing is dark, dif­fi­cult, but what­ev­er the dif­fi­cul­ties we are going through, there is only one per­son who can come to our res­cue. There must be an insti­tu­tion to lead to this per­son: it is the Church.

Remind­ing the Church of her true mis­sion: it is a way of say­ing that she some­times devi­ates from it. You go so far as to denounce the pas­tors who betray their sheep, which many Catholics find hard to believe…
Your remark is not spe­cif­ic to our time: look at the Old Tes­ta­ment, which abounds in bad pas­tors, those men who like to enjoy the meat or wool of their sheep, with­out tak­ing care of them! There have always been betray­als in the Church. Today, I am not afraid to say that priests, bish­ops and even car­di­nals are afraid to pro­claim what God teach­es and to trans­mit the doc­trine of the Church. They are afraid of being dis­ap­proved, of being seen as reac­tionar­ies. So they say things that are vague, vague, impre­cise, to avoid any crit­i­cism, and they espouse the stu­pid evo­lu­tion of the world. It is a betray­al: if the pas­tor does not lead his flock to the still waters, to the mead­ows of fresh grass of which the psalm speaks, if he does not pro­tect it from the wolves, he is a crim­i­nal pas­tor who aban­dons his sheep. If he does not teach faith, if he indulges in activism instead of remind­ing peo­ple that they are made to pray, he betrays his mis­sion. Jesus said, “I will strike the shep­herd, and the sheep will be scat­tered. “That’s what’s hap­pen­ing today. We don’t know who to turn to anymore.

Clear­ly, there is a strong major­i­ty of priests who remain faith­ful to their mis­sion of teach­ing, sanc­ti­fi­ca­tion and gov­ern­ment. But there is also a small num­ber who give in to the mor­bid and evil temp­ta­tion to align the Church with the val­ues of con­tem­po­rary West­ern soci­eties.
Is there not today, more specif­i­cal­ly, the temp­ta­tion for some to align the Church with the val­ues of the world, so that they are no longer in con­tra­dic­tion with it?
Clear­ly, there is a strong major­i­ty of priests who remain faith­ful to their mis­sion of teach­ing, sanc­ti­fi­ca­tion and gov­ern­ment. But there is also a small num­ber who give in to the mor­bid and evil temp­ta­tion to align the Church with the val­ues of con­tem­po­rary West­ern soci­eties. Above all, they want us to say that the Church is open, wel­com­ing, atten­tive and mod­ern. But the Church is not made to lis­ten, she is made to teach: she is Moth­er and Mag­is­tra, moth­er and edu­ca­tor. Of course, the moth­er lis­tens to her child, but she is first present to teach, guide and direct, because she knows bet­ter than her chil­dren the direc­tion to take. Some have adopt­ed the ide­olo­gies of today’s world under the false pre­text of open­ing up to the world; but instead, we should encour­age the world to open itself to God, who is the source of our existence.

You speak in your book of a cri­sis of moral the­ol­o­gy: is it not above all the temp­ta­tion to sac­ri­fice doc­trine for pas­toral care, that is, the con­tent for the con­tain­er, and a false con­cep­tion of mer­cy, so con­cerned about dis­play­ing its under­stand­ing that it for­gets to recall the rules of good life?
All pas­toral work is like a house: if there are no foun­da­tions, the house col­laps­es. Pas­toral care must be built on the teach­ing of the Church. Too often the doc­trine is for­got­ten to focus only on pas­toral care; but it is then an emp­ty, child­ish and sil­ly pas­toral care. Doc­trine can­not be sac­ri­ficed to a pas­toral min­istry that would be reduced to the small por­tion of mer­cy: God is mer­ci­ful, but only to the extent that we rec­og­nize that we are sin­ners. To allow God to exer­cise His mer­cy, we must return to Him, like the prodi­gal child. There is a per­verse ten­den­cy to dis­tort pas­toral care, to oppose it to doc­trine, and to present a mer­ci­ful God who demands noth­ing: but there is not a father who does not demand any­thing from his chil­dren! God, like any good father, is demand­ing, because he has immense ambi­tions for us. The Father wants us to be in his image and likeness.

You speak of a weak­en­ing of the faith of the faith­ful, what Bene­dict XVI called a “bour­geois Chris­tian­i­ty” or what Pope Fran­cis calls the “pagani­za­tion of the Chris­t­ian life”. Those Chris­tians who no longer want to be the salt of the Earth but pre­fer to be its sug­ar, is this not an even greater chal­lenge than the here­sies of the past?
This kind of soft­ness or dulling is part of today’s cul­ture: you have to be tol­er­ant, respect peo­ple, evolve with them. Of course, we have a duty to be under­stand­ing, to walk at peo­ple’s pace, but at the same time we must help them strength­en their mus­cles. You need mus­cles to do moun­taineer­ing. The same qual­i­ties are required to climb the moun­tain God: you need the mus­cles of faith, will, hope, and love. It is impor­tant that we do not deceive the faith­ful with a soft reli­gion, with­out demands, with­out morals. The Gospel is demand­ing: “If your eye is an oppor­tu­ni­ty for you to fall, tear it off! If your right hand is an oppor­tu­ni­ty to fall, cut it off! “Our role is pre­cise­ly to bring the peo­ple to this evan­gel­i­cal demand.

You write that “the West expe­ri­ences the rad­i­cal and delib­er­ate­ly willed soli­tude of the damned”: how can we talk about God to peo­ple who, as you write, “do not feel the need to be saved”?
Look at Christ: do you think the peo­ple in front of him want­ed to lis­ten to him? Oppo­si­tion to God, to the Truth, has always exist­ed. In the West, it is dif­fi­cult to talk about God, because the soci­ety that emol­li­fies well-being believes it does not need Him. But this mate­r­i­al com­fort is not enough. There is a hid­den hap­pi­ness that peo­ple seek con­fus­ing­ly with­out know­ing it. The Church must make man dis­cov­er those inner needs, those rich­es of the soul that make him ful­ly human, that make him ful­ly hap­py. Saint Ire­naeus says that “God became man so that man might become God”; it is the mis­sion of the Church to guide man in this ascent to God. But if priests are stuck in mate­ri­al­ism, they will not be able to guide the world to true happiness.

True reform is about our own con­ver­sion. If we do not change our­selves, all struc­tur­al reforms will be use­less. Lay peo­ple, priests, car­di­nals, we must all return to God.
This dis­af­fec­tion with the Church is often blamed by Catholic lead­ers on the pre­vail­ing mate­ri­al­ism and changes in soci­ety. Would it not be use­ful for the Church to also ques­tion its respon­si­bil­i­ties, how it has been able to dri­ve the faith­ful away by des­e­crat­ing the litur­gy, by turn­ing its back on pop­u­lar pity or by weak­en­ing its preach­ing?
I am con­vinced that the pri­ma­ry respon­si­bil­i­ty for this col­lapse of faith must be assumed by priests. In Catholic sem­i­nar­ies or uni­ver­si­ties, we have not always taught doc­trine. We taught what we liked! The cat­e­chism for chil­dren has been aban­doned. The con­fes­sion was despised. Besides, there were no more priests in the con­fes­sion­als! We are there­fore part­ly respon­si­ble for this col­lapse. In the sev­en­ties and eight­ies in par­tic­u­lar, each priest did what he want­ed at Mass. No two Mass­es were alike: this is what dis­cour­aged so many faith­ful from com­ing to them. Pope Bene­dict XVI says that the cri­sis in the litur­gy has caused the cri­sis in the Church. Lex oran­di, lex cre­den­di: as we pray, we believe. If there is no more faith, the litur­gy is reduced to a show, to folk­lore, and the faith­ful turn away. We were prob­a­bly guilty of neg­li­gence. The desacral­iza­tion of the litur­gy always has seri­ous con­se­quences. We want­ed to human­ize the Mass, make it under­stand­able, but it remains a mys­tery that is beyond com­pre­hen­sion. When I say Mass, when I give abso­lu­tion, I grasp the words I say, but the mys­tery that these words real­ize, the intel­li­gence can­not under­stand it. If we do not do jus­tice to this great mys­tery, we can­not lead the peo­ple to a true rela­tion­ship with God. Even today, we have a pas­toral care that is too hor­i­zon­tal: how can peo­ple think of God, if it is only social issues that occu­py the Church?

A reform of the Roman curia is immi­nent. In your book, you are quite scep­ti­cal about these struc­tur­al reforms.…
True reform is about our own con­ver­sion. If we do not change our­selves, all struc­tur­al reforms will be use­less. Lay peo­ple, priests, car­di­nals, we must all return to God. His­to­ry has seen two reform­ers: Luther, who want­ed to change the face of the Church and even­tu­al­ly emerged from it, and Fran­cis of Assisi, who trans­formed the Church by rad­i­cal­ly liv­ing the Gospel. Today, true reform is a rad­i­cal­ly evan­gel­i­cal life. Moth­er Tere­sa, in a dis­creet and hum­ble way, reformed the Church, nev­er tir­ing of pro­claim­ing before the world: “Take care of the poor, but before that, take care first of God”. She knew from expe­ri­ence that we are too poor to care for the poor. As long as we are not enriched by the pres­ence of God in us, we can­not care for the weakest.

We also talk a lot about syn­odal­i­ty, col­le­gial­i­ty. You point out in your book the risk that Epis­co­pal Con­fer­ences may con­tra­dict each oth­er. Do you fear that a reform of the Roman Church’s cen­tral­ism will endan­ger its uni­ty?
Christ found­ed a Church whose mode of gov­ern­ment is hier­ar­chi­cal. The first leader of the Church is the Pope. The first leader of the local Church is the bish­op in his dio­cese, and not the Bish­ops’ Con­fer­ence, which is use­ful for exchange, not for impos­ing lead­er­ship. I think that this pri­ma­ry respon­si­bil­i­ty of the Pope and each bish­op must be restored. The great bish­ops of his­to­ry, Ambrose or Augus­tine, did not spend their time mak­ing meet­ings on the right, com­mis­sions on the left, con­tin­u­ous jour­neys. The bish­op must be with his peo­ple, teach his peo­ple, love his people.

A Bish­ops’ Con­fer­ence has no legal author­i­ty or com­pe­tence in the field of doc­trine. More­over, I sad­ly note that there are already con­tra­dic­tions between the Bish­ops’ Con­fer­ences, which does not favour the seren­i­ty of Chris­tians. “May they be one,” said the Lord, so that this uni­ty may pro­voke faith. If we con­tin­ue in this direc­tion of under­min­ing doc­tri­nal and moral uni­ty, we will help to increase unbelief.

What did you think of the Sodoma book? Do you think that we are cur­rent­ly wit­ness­ing a wide­spread offen­sive against the fig­ure of the priest, an object of scan­dal for a hyper­sex­u­al­ized soci­ety?
I haven’t read this book. But I believe that there is a par­tic­u­lar­ly struc­tured plan to destroy the Church by behead­ing the head, the car­di­nals, the bish­ops and the priests. We are deter­mined to destroy the priest­hood, and in par­tic­u­lar to destroy celiba­cy, which would be impos­si­ble and unnat­ur­al: because if we destroy celiba­cy, we affect with­out return one of the great­est rich­es of the Church. Aban­don­ing celiba­cy would fur­ther aggra­vate the cri­sis of the Church and weak­en the posi­tion of the priest, who is called to be not only anoth­er Christ, but Christ him­self, poor, hum­ble and unmar­ried. If celiba­cy dis­ap­pears, it is the tes­ti­mo­ny Jesus want­ed to give that dies.

There is a desire to weak­en the Church, to change her teach­ing on sex­u­al­i­ty. But when we see the enor­mous num­ber of faith­ful priests in the priest­hood, we must remain serene and con­tin­ue our wit­ness of total gift to God through celiba­cy. This tes­ti­mo­ny is not under­stood. Is he hat­ed? Jesus Christ him­self was not accept­ed, since he died on the Cross. Jesus told us: “They per­se­cut­ed me, they will per­se­cute you too. »

There are men of the Church, some in high places, who have tar­nished the Church, dis­fig­ured the face of Christ, but Judas must not lead us to reject all the apos­tles. These seri­ous fail­ures do not con­demn the Church: on the con­trary, they show that God trusts even weak peo­ple to show the pow­er of his love for us. He does not entrust his Church to excep­tion­al heroes, but to sim­ple men, to show that it is He who acts through them.

I am shocked that Bish­op Bar­barin has been con­demned while the hor­ri­ble priest who com­mit­ted these unspeak­able crimes has still not been judged… I stand by Car­di­nal Bar­barin in prayer, as I stand by the vic­tims.
On pae­dophil­ia, you speak of a “mys­tery of Judas”, spec­i­fy­ing that this abom­inable betray­al of the priest­hood was pre­ced­ed by many oth­ers: what are they?
A priest who has lost his bond with Jesus, who does not pray, who does not take the time to be with Christ before the Blessed Sacra­ment, is a weak­ened priest. “With­out me, there is noth­ing you can do,” said Christ. A world­ly priest who no longer has time to med­i­tate on the Word of God, who fails to cel­e­brate his Mass or cel­e­brates it in a pro­fane way, who has no inner life, can­not hold on. If we can achieve such seri­ous actions, it is because we first detached our­selves from Jesus, from the force that keeps us con­nect­ed to him. In order not to dis­trib­ute the sacra­ments like a sim­ple civ­il ser­vant, as if it were a sim­ple human phe­nom­e­non, we need an ener­gy that comes from our rela­tion­ship with the Holy Spir­it. And unfor­tu­nate­ly, many of us have lost this inti­mate rela­tion­ship with Jesus. Priest­ly activism leads to cler­i­cal autism, the source of all abuses.

What do you think of Car­di­nal Bar­bar­in’s con­vic­tion?
I’ve known him for a long time. I have a lot of admi­ra­tion for him. He wel­comed me very friend­ly when I came to Lyon to present my book La Force du silence. I can­not avoid suf­fer­ing from the mar­tyr­dom imposed on him, espe­cial­ly since I am con­vinced that he is inno­cent. The whole Church car­ries this suf­fer­ing col­lec­tive­ly. The Pope was real­ly right to take the deci­sion not to accept his res­ig­na­tion in order to respect the pre­sump­tion of inno­cence while await­ing the judg­ment on appeal. And Car­di­nal Bar­barin was coura­geous to step back, leav­ing for a monastery, for the good of the dio­cese and to bring peace to the vic­tims of these abom­inable acts. But I am shocked that Bish­op Bar­barin has been con­demned while the hor­ri­ble priest who com­mit­ted these unspeak­able crimes has still not been judged… I stand by Car­di­nal Bar­barin in prayer, as I stand by the victims.

Many of our con­tem­po­raries see the Church as a total­i­tar­i­an orga­ni­za­tion, which will impose a way of life on them. On the con­trary, you affirm that it is the Church that is the bul­wark against con­tem­po­rary total­i­tar­i­an­ism…
It is the new ide­olo­gies that impose a rad­i­cal change in moral­i­ty, human anthro­pol­o­gy, a new vision of the fam­i­ly, sex­ol­o­gy, with sig­nif­i­cant finan­cial and media pres­sures. The Church does not impose any­thing, it only pro­pos­es. But it is its mis­sion to offer God’s teach­ing to the world.

You go so far as to turn “Islamist bar­barism” and “mate­ri­al­ist bar­barism” against each oth­er, at the risk of shock­ing…
In any case, that’s my con­vic­tion! They are two demons, who may have dif­fer­ent method­olo­gies, but they are work­ing in the same direc­tion. Mate­ri­al­ism rad­i­cal­ly dis­tances us from God and from the inner man. Islamism too. God can­not inspire bar­barism. Killing some­one because they don’t share your faith? Blow­ing up a bomb on a bus and killing inno­cent peo­ple in the name of Allah? This is impos­si­ble for God.

But mate­ri­al­ist bar­barism does not have as its stat­ed objec­tive destruc­tion, it claims to bring man to the hap­pi­ness of lib­er­a­tion.…
It is destroy­ing a man to say to him: “You are free to choose your sex. “It is actu­al­ly the free­dom to destroy one­self. But God alone makes us free! Nowa­days, there is so much human destruc­tion, under the pre­text of free­dom! In the name of the same free­dom, many young peo­ple are destroyed by pornog­ra­phy. Man destroys him­self; God cre­ates, so that man may have life, and life in fullness.

You also write that the mod­ern world destroys by attack­ing iden­ti­ties. On the con­trary, you defend this root­ed­ness that Simone Weil described as the first need of the human soul. This makes you a some­what iso­lat­ed voice in a Church that some­times seems to have become a mere sub­sti­tute for the immi­gra­tion par­ty…
When I went to Poland[in Octo­ber 2017, edi­tor’s note], a coun­try that is often crit­i­cized, I encour­aged the faith­ful to affirm their iden­ti­ty as they have done for cen­turies. My mes­sage was sim­ple: you are first Pol­ish, Catholic, and then only Euro­pean. You must not sac­ri­fice these first two iden­ti­ties at the altar of tech­no­crat­ic and state­less Europe. The Brus­sels Com­mis­sion is only think­ing of build­ing a free mar­ket at the ser­vice of the major finan­cial pow­ers. The Euro­pean Union no longer pro­tects peo­ple. It pro­tects banks. I want­ed to repeat to Poland its sin­gu­lar mis­sion in God’s plan. It is free to tell Europe that every­one has been cre­at­ed by God to be placed in a spe­cif­ic place, with its cul­ture, tra­di­tions, and his­to­ry. This cur­rent desire to glob­al­ize the world by sup­press­ing nations and speci­fici­ties is pure mad­ness. The Jew­ish peo­ple had to go into exile, but God brought them back to his coun­try. Christ had to flee Herod to Egypt, but he returned to his coun­try after Herod’s death. Every­one must live in their own coun­try. Like a tree, every­one has their own soil, their own envi­ron­ment where they flour­ish per­fect­ly. It is bet­ter to help peo­ple to flour­ish in their cul­ture than to encour­age them to come to a Europe in decline. It is a false exe­ge­sis to use the Word of God to val­ue migra­tion. God nev­er want­ed these tears.

We must be resisters in every­thing, we must take the oppo­site direc­tion of the sec­u­lar­ized world, that is, the road of Christ, the only sav­ior of the world. I encour­age young peo­ple to look to Christ.
You write that the coun­tries of the Viseg­rad Pact or Italy are mov­ing in the right direc­tion, while so many voic­es in the Church con­demn them. Do you not think that the Church risks its future there: how to evan­ge­lize peo­ples by con­demn­ing their con­cern to remain them­selves?
Are the lead­ers who speak like me now a minor­i­ty? I don’t think so. There are many coun­tries that are mov­ing in this direc­tion, and this should make us think! All migrants arriv­ing in Europe are parked, with­out work, with­out dig­ni­ty… Is this what the Church wants? The Church can­not coop­er­ate with this new form of slav­ery that mass migra­tion has become. If the West con­tin­ues along this fate­ful path, there is a great risk that, in the absence of a birth rate, it will dis­ap­pear, invad­ed by for­eign­ers, just as Rome was invad­ed by the bar­bar­ians. I speak in African. My coun­try is pre­dom­i­nant­ly Mus­lim. I think I know what real­i­ty I’m talk­ing about.

Some in the Church seem to be able to put an end to Europe, to write it off as a prof­it and loss. On the con­trary, you write that the pagani­za­tion of Europe would lead to the pagani­za­tion of the world…
God does not change his mind. God gave a mis­sion to Europe that wel­comed Chris­tian­i­ty. Then the Euro­pean mis­sion­ar­ies brought Christ to the ends of the earth. And it was not a coin­ci­dence, but God’s plan. This uni­ver­sal mis­sion that He gave to Europe when Peter and Paul came to set­tle in Rome, from which the Church evan­ge­lized Europe and the world, is not over. But if we put an end to it by sink­ing into mate­ri­al­ism, for­get­ting God and apos­ta­sy, then the con­se­quences will be seri­ous. If Europe dis­ap­pears, and with it the price­less val­ues of the old con­ti­nent, Islam will invade the world, and we will total­ly change cul­ture, anthro­pol­o­gy, and moral vision.

You quote Bene­dict XVI very abun­dant­ly, when so many peo­ple con­sid­er this abort­ed pon­tif­i­cate a fail­ure. What do you think is its fer­til­i­ty?
God saw that the world was sink­ing into a dis­as­trous con­fu­sion. He knows that no one knows where we’re going any­more. He can see that we are los­ing more and more our iden­ti­ties, our beliefs, our vision of man and the world… To pre­pare our­selves for this sit­u­a­tion, God has giv­en us sol­id popes: He gave us Paul VI, who defend­ed life and true love, despite very strong oppo­si­tions, with the encycli­cal Humanae vitae; he gave us John Paul II, who worked on the mar­riage of faith and rea­son so that they could be the light that guides the world towards a true vision of man — the very life of the great Pol­ish Pope was a liv­ing Gospel. He gave us Bene­dict XVI, who com­posed a teach­ing of unpar­al­leled clar­i­ty, depth and pre­ci­sion. Today, he gives us Fran­cis who lit­er­al­ly wants to save Chris­t­ian human­ism. God will nev­er aban­don His Church.

That is why we must remain calm: the Church is not in cri­sis, we are in cri­sis. His teach­ing remains the same, his clar­i­ty the same. It is true that Bene­dict XVI was not under­stood or accept­ed, his past at the Con­gre­ga­tion for the Doc­trine of the Faith had made him see him­self as a tra­di­tion­al­ist, a reac­tionary, but he remained calm, serene and hum­ble. It has been a foun­da­tion for doc­trine, for the inte­ri­or life, for the future of the Church.

To Catholic youth, you quote this very beau­ti­ful sen­tence from the Eng­lish poet T.S. Eliot: “In the world of fugi­tives, who­ev­er takes the oppo­site direc­tion will look like a desert­er. “Are young believ­ers des­tined to be resis­tance fight­ers?
We must be resisters in every­thing, we must take the oppo­site direc­tion of the sec­u­lar­ized world, that is, the road of Christ, the only sav­ior of the world. I encour­age young peo­ple to look to Christ. In Hem­ing­way’s nov­el The Old Man and the Sea, we see the hero try­ing to tow a large fish he caught to the port. But he can’t pull it out of the water alone; by the time it gets to port, the sharks have eat­en the fish. Young peo­ple are weak­ened today by so many demands that if they iso­late them­selves, they run the enor­mous risk of being devoured. Today, if you are alone, there are many sharks that will devour your faith, your Chris­t­ian val­ues, your hope. Jesus cre­at­ed a com­mu­ni­ty of twelve apos­tles and when it came time to send them on mis­sion, he sent them two by two. From now on, to defend our belief, to be sol­id, we must sup­port each oth­er in faith, walk as a com­mu­ni­ty unit­ed around Christ: “Where two or three are gath­ered, I am in the midst of them. “It is from this pres­ence that we can draw our strength. The evening is approach­ing and the day is already falling, a thought­ful and rea­soned response to this urgency.

Inter­view in Rome by Lau­rent Dandrieu

The evening is approach­ing and already the day is falling, from Car­di­nal Robert Sarah with Nico­las Diat, Fayard, 450 pages, 22,90 €.